2021, le grand retournement de tendance

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Alors qu’ils étaient à la peine en raison de la baisse des ventes l’année passée, les producteurs de champagne ont retrouvé le sourire en 2021. En eff et, le marché euphorique révèle un retour opportun des consommateurs qui survient au moment d’une des pires vendanges du vignoble.

En l’espace d’un an, la situation du vignoble champenois s’est diamétralement inversée. À l’aube des vendanges 2020 qui s’annonçaient généreuses, l’interprofession freinait des quatre fers les ardeurs des viticulteurs en limitant les rendements à 8 000 kg de raisins par hectare, les obligeant ainsi à sacrifier 20 % de leurs vendanges potentielles. La première vague de la Covid était passée par là. Les ventes annuelles avaient perdu près d’un tiers de leur volume habituel, soit près de 100 000 bouteilles de champagne. Les caves débordaient et il paraissait donc prudent de limiter les stocks.

Un an plus tard, nouveau scénario : le gel, la grêle, puis le mildiou auraient fait baisser les quantités de raisins vendangées de 30 %. Dans le même temps, les marchés se sont réveillés. À l’export, comme en France, les commandes ont afflué. Les grandes maisons, comme Ayala, reconnaissent avoir été surprises par l’afflux de la demande et avoir du mal à faire face. Certaines procèdent même à des allotements.

Ventes records

On devrait ainsi assister en 2021 à des ventes records, sans doute au-delà des 320 millions de bouteilles, soit largement au-dessus du niveau de 2019 où le marché ne dépassait pas les 300 millions de bouteilles. On note des niveaux de prix astronomiques sur de très vieux millésimes, voire sur des champagnes plus récents. Ainsi un nabuchodonosor (15 litres) de champagne Cardon (millésime 2000) vient d’être vendu aux enchères, à Londres, au prix astronomique de 250 000 €.

Confrontés à l’appétit retrouvé, des opérateurs manquent de vin et regrettent déjà d’avoir limité les rendements des vendanges 2020. Certains ressortent même le vieux dossier de l’extension de l’aire d’appellation. Un serpent de mer initié il y a 18 ans et qui refait épisodiquement surface. Pour l’instant, il n’y a pas d’affolement. Les prix du raisin sont plutôt stables. Les Champenois ont la particularité de pouvoir stocker des vins de réserve. Un atout précieux pour compenser les déficits volumétriques de certaines vendanges comme c’est le cas cette année. C’est aussi pratique pour gommer certains défauts de maturité de certains millésimes ou pour doper certaines cuvées spéciales.

Mécaniquement cependant, les réserves devraient être très sollicitées cette année pour vinifier le champagne qui commencera à sortir des caves dans deux ans et demi à trois ans. Leur niveau va donc singulièrement baisser et certains responsables de grandes maisons frémissent déjà à l’idée de prochains millésimes pauvres en volume. Les champagnes sont aujourd’hui concurrencés en France et dans le monde entier par d’autres vins effervescents qui connaissent un fort développement, notamment en Italie et en Espagne. Leur salut réside dans une montée en gamme. Qu’il s’agisse de démarche bio ou de recherche de concentrations, cette quête de qualité va forcément passer des sacrifices en matière de rendement dans un vignoble généreux qui offre en moyenne des rendements de l’ordre de 60 hl/ha.

Varier sa carte

Aussi, à terme, on pourrait s’attendre à des hausses significatives des prix de ces vins dans les années qui viennent. Cette montée en qualité, déjà largement perceptible, va aussi imposer le champagne comme un vin de table, un vin d’accompagnement de repas. Le consommateur recherche les nuances. Il est fini le temps où un restaurant ou une brasserie pouvait se contenter de proposer deux ou trois champagnes à la carte. Sans aller jusqu’à suivre l’exemple des Crayères, restaurant rémois repère des maisons champenoises, qui ne propose pas moins de 850 références, il convient de varier davantage son off re. Jouer la carte des grandes maisons peut être tentant. Le marketing qu’elles développent apparaît rassurant. Mais de plus en plus, le rôle du restaurateur est de guider ses clients vers des découvertes. Le vivier des vignerons indépendants est à cet égard précieux, même si ces derniers ont perdu 27 % de leurs volumes de vente en 20 ans. Ils ont peu accès à l’export et sont rarement habitués à travailler avec la restauration. Il existe de nombreuses exceptions, à l’instar de la maison Colin à Vertus (Marne) qui évolue dans la même famille depuis sept générations et qui se consacre essentiellement au réseau traditionnel.

Forte d’une taille critique de 11 ha, la maison familiale, dominée par le chardonnay, dispose aussi d’approvisionnement en pinots noir et meunier. Bien pourvue en premiers crus, elle est capable de procéder à des sélections parcellaires et dispose même d’un clos. Elle parvient ainsi à proposer des cuvées de grande qualité avec des rapports qualité-prix très attractifs.

Les coopératives ne doivent pas être négligées. Certaines se développent activement. Ainsi, après avoir racheté Henri Abelé, Nicolas Feuillatte se prépare à fusionner avec Castelnau pour former une entité qui va régner sur 3 000 ha du vignoble. On pourrait aussi citer d’autres acteurs, plus discrets comme Chassenay-d’Arce qui dispose d’un terroir spécifique et qui s’est doté d’installations performantes capables de réaliser le travail nécessaire à l’élaboration de grandes cuvées.

BOLLINGER : éclosions de cuvées spéciales

Bollinger vient de dévoiler son millésime 2013. Ce champagne, blanc de noirs, issu des vignobles de la Montagne de Reims, est réalisé à partir d’une année où la vendange fut très tardive. Élevé sept ans sur lies, ce champagne est composé de 92 % de grands crus. Il est dosé à 6 g/litre. Baptisée B 13, cette cuvée bénéficie d’une étiquette où le B et le 13 se confondent dans un graphisme très étudié. La maison de champagnes d’Ay multiplie par ailleurs les nouvelles cuvées, notamment avec une nouvelle sélection parcellaire PN VZ 16, ce qui correspond à pinot noir, Verzenay (cru principal) et 2016 (année de base, sachant que le vin le plus vieux provient des vendanges 2006). Il s’agit de la seconde édition de champagne dans la collection PN destinée à mettre en valeur le pinot noir, cher à Bollinger, mais aussi les terroirs de la Montagne de Reims. Enfin, la maison dévoile un nouveau millésime 2007 de la cuvée RD, un champagne faiblement dosé, récemment dégorgé (10 juillet 2020). Cette collection qui met également le pinot noir à l’honneur (70 %) fut initiée par madame Bollinger en 1967 à partir d’un millésime de 1952.

www.champagne-bollinger.com

MUMM : une dégustation pas comme les autres

Du 15 au 18 décembre 2021, La Maison Mumm organisera Taste, une opération de dégustation de sa cuvée Mumm Cordon Rouge dans un rooftop parisien dont l’adresse est encore tenue secrète. La maison de champagne entend ainsi réinventer l’exercice de dégustation au sein d’un écrin immersif utilisant une technologie d’écrans, donnant l’impression d’effacement des notions de temps et d’espace.

La vue, l’ouïe et l’odorat seront sollicités à cette occasion. Le dispositif a été imaginé par le chef de cave de la marque, Laurent Fresnet et Gabriel Lepousez, agrégé de biologie et docteur en neurosciences. Moyennant 50 €/ personne, Mumm Cordon Rouge sera servi dans deux coupes distinctes et dégusté dans deux environnements différents.

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