Cap sur le bulot de Granville

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Le bulot de la baie de Granville concentre la moitié des volumes pêchés en France. Focus sur un coquillage devenu en quelques décennies la star des apéros iodés.

Plus de 6 000 tonnes de bulots sont pêchées chaque année rien qu’en baie de Granville, la moitié des volumes commercialisés en France. C’est ici, dans l’ouest Cotentin, que s’est développée la pêche de ce coquillage traditionnellement utilisé… comme appât. Car le bulot n’est consommé à grande échelle que depuis quelques décennies. « Il ne s’est vraiment exporté qu’au cours des années 1990 avec le développement de procédés de cuisson permettant d’allonger sa durée de commercialisation », explique Dominique Lamort, responsable qualité chez Normandie Fraîcheur Mer, principal groupement de marins-pêcheurs, criées et mareyeurs normands. « Aujourd’hui, c’est le fruit de mer incontournable, à la fois abordable et convivial. »

Triés à bord et débarqués vivants

En 2019, après 11 années de démarches, le bulot granvillais décroche enfin son IGP. Une reconnaissance officielle qui vient récompenser le savoir-faire de toute une filière, depuis le pont des caseyeurs jusqu’à l’étal du poissonnier. « Nous voulions faire reconnaître la qualité du bulot de Granville, non pour concurrencer les autres zones de pêches françaises et normandes, reprend Dominique Lamort, mais pour le distinguer des produits anglais et irlandais, souvent pêchés sur des zones vaseuses et qualitativement moins bons. » Ici, brassées par les plus grandes marées d’Europe, les eaux froides et sableuses de la Manche apportent aux bulots de la baie une saveur d’iode, d’algue et de noisette caractéristiques. L’aire d’appellation s’étend de Granville à Diélette, sur une bande littorale de 30 milles nautiques, jusqu’à l’île de Jersey. Un terroir qui a aussi permis de conserver une dimension artisanale à la pêcherie granvillaise: les bulots sont capturés au casier à bord de bateaux de moins de 12 m, au cours de marées ne dépassant pas 16 h.

Sur les 70 navires bulotiers opérant en baie de Granville, près d’une trentaine ont déjà adopté le cahier des charges de l’IGP.

Triés à bord, ils sont stockés dans des caisses ajourées et constamment arrosés, puis débarqués vivants. Commercialisés sous 48 h, ils peuvent alors être cuits dans le même délai, pour un maximum de tendreté. Une trentaine d’artisans-pêcheurs sont aujourd’hui impliqués dans le déploiement de l’IGP, ainsi que deux criées et une demi-douzaine de mareyeurs-cuiseurs. Selon le cahier des charges, 1 000 tonnes de bulots pêchés sont déjà débarquées chaque année. Mais la filière souffre de la fermeture des restaurants. « La saison a été difficile » , confie Dominique Lamort. « Le mois de mars est traditionnellement une période de forte activité pour les bulotiers. Mais avec le premier confinement, le marché s’est engorgé. Il a fallu diminuer les jours de pêche, arrêter les bateaux. Bilan, un tiers des volumes n’a pas été pêché par rapport à 2019, et les prix ont en moyenne baissé de 10 %. »

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