Ces nouveaux acteurs qui se passent des restaurants

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Le succès de la restauration livrée permet à de nouveaux opérateurs d’émerger. Certains d’entre eux n’utilisent pas les restaurants et ont choisi de prendre en main la fabrication des repas en mettant en avant des principes nutritionnels ou environnementaux. Tandis que d’autres, comme Resto du coin, s’efforcent de proposer aux restaurants une alternative économique aux grands acteurs de la livraison.

Le marché de la livraison de repas est-il en mutation ? Depuis quelques mois, les principales plateformes du secteur cherchent à fidéliser leurs consommateurs. Alors que Deliveroo proposait en fin d’année dernière un abonnement de livraison gratuite à seulement 1 € par mois (au lieu de 10,99 €), Uber Eats offre depuis le 11 décembre le même service à ses clients pour 5,99 € mensuels. En septembre 2020, Just Eat avait pour sa part décidé de supprimer les frais de gestion des commandes, sachant que beaucoup de restaurants partenaires de l’enseigne britannique ne répercutent aucuns frais de livraison aux consommateurs. Alors que ces géants de la livraison s’adaptent à un contexte critique pour la restauration traditionnelle, de nouveaux acteurs intègrent ce marché. Afin de répondre à une clientèle plus responsable et soucieuse d’une alimentation plus saine, de nouveaux concepts de livraison de repas émergent aujourd’hui. Émanation de FoodChéri, l’enseigne Seazon propose depuis avril 2018 des plats frais et personnalisables selon les préférences alimentaires de ses clients, à partir d’ingrédients bruts, sans additifs, ni conservateurs. La démarche de Seazon est d’aider les Français « à mieux manger en leur faisant prendre pleinement conscience de leur rôle de consommateur, déterminant pour l’avenir de la société », affirme son fondateur Patrick Asdaghi. L’entreprise française a déjà créé plus de 1 000 recettes, privilégiant la gamme végétale et limitant au maximum les protéines animales.

Seazon, une livraison hebdomadaire 

Sur l’ensemble des plats Seazon, 91 % ont reçu un Nutri-Score A ou B et le nombre de calories est précisé sur chacun d’entre eux. Outre la qualité des produits, ces repas préparés dans une cuisine centrale de Sucy-en-Brie (Val-de-Marne) sont livrables à travers toute la France sur abonnement. Chaque semaine, environ 50 000 repas y sont produits. « Notre concept est différent, c’est le premier abonnement de plats froids déjà cuisinés, il suffit juste de les réchauffer. Il est simple de s’abonner et de décaler les livraisons en cas d’absence, explique Marine Ricklin, directrice marketing de Seazon. Nous sommes en partenariat avec Chronofresh, ce qui nous permet de livrer en liaison froide nos produits conditionnés sous atmosphère modifiée, dans tous les codes postaux de France. »

Season a créé 1 000 recettes, privilégiant la gamme végétale et limitant au maximum les protéines animales.

Les clients peuvent choisir entre quatre et vingt plats par semaine sur la plateforme. Seazon est vivement engagé pour le bien-être des consommateurs mais aussi celui de la planète. « Nous faisons attention à l’équilibre de nos recettes : nous étions les premiers à utiliser le Nutri-Score en restauration et nous lancerons prochainement l’Eco-Score », précise Marine Ricklin. L’Eco-Score est une note permettant de classer les produits alimentaires selon leur impact environnemental (de A à E). Cet indicateur, développé par plusieurs sites et applications engagés – dont Seazon, Yuka, Open food facts et Frigomagic – prend en compte les impacts de la production, du transport, de la fabrication, des emballages, de la saisonnalité des recettes… En moyenne, un plat Seazon aurait une empreinte carbone réduite de moitié (770 g de CO2 contre 1 530 g de CO2 pour un plat consommé en France). Les engagements de la marque sont nombreux depuis sa création. Elle a notamment signé la charte Karma pour lutter contre le gaspillage alimentaire, en octobre 2019, elle a supprimé le nitrite de sa charcuterie (sauf le jambon sec) en avril 2020 et « nous ne vendons plus de bœuf depuis septembre dernier », ajoute la directrice marketing.

« Ce qui nous incarne, c’est le livreur »

Dans le même sillage, Eatology offre des plats conçus à partir de produits frais en livraison quotidienne, à Paris et quelques villes de petite couronne, depuis janvier 2020. Cette société fondée à Hong Kong il y a six ans est axée sur le marché du régime haut de gamme (panier moyen de 36 € la journée), et propose des repas en fonction des objectifs de ses clients : bien-être, alimentation végétarienne, limitation des glucides. « En amont, nous avons travaillé nos recettes avec des nutritionnistes et développé un outil pour calculer le nombre de calories de chacun des repas. Nous passons beaucoup de temps sur ce travail avec les nutritionnistes. En cuisine, nos chefs ont des fiches détaillées avec le grammage des recettes », présente Raphaël Boccara, l’un des fondateurs d’Eatology.

Eatology offre des plats conçus à partir de produits frais en livraison quotidienne.

La jeune entreprise évalue son taux de réabonnement autour de 90 % auprès de ses consommateurs parisiens. Une clientèle attirée par la volonté de perdre du poids, mais séduite également par la réduction de « la charge mentale » qu’offrent des plats déjà préparés pour toute la journée. Eatology travaille en partie avec des acheteurs de Rungis pour produire ses plats. Concernant la livraison, l’enseigne a fait évoluer son modèle, après avoir sollicité la start-up lituanienne de logistique urbaine Ziticity. « Au début, nous avions eu des livreurs de Ziticity, mais maintenant nous avons nos propres moyens et commençons aussi à travailler avec des auto-entrepreneurs. Ce qui nous incarne, c’est le livreur. C’est l’image d’Eatology, la première personne que les gens voient le matin. Nous avons des livreurs qui partent avec dix sacs, ils savent qu’il y aura des livraisons avec nous », poursuit Raphaël Boccara.

« Nous faisons attention à l’équilibre de nos recettes : nous étions les premiers à utiliser le Nutri-Score en restauration. »

En ligne depuis quelques jours, l’application Resto du coin fonctionne sur le principe du marketplace. Elle met en relation les restaurants et les consommateurs, et se présente comme « un Uber eats français à la fois simple, local et équitable », s’appuyant sur une livraison de plats « à proximité immédiate ». Depuis la crise sanitaire, cette société est partie du constat que les restaurateurs perdaient le lien avec leurs clients et que la digitalisation n’était pas toujours évidente. « L’objectif est de répondre aux problèmes d’organisation. Et pour cela, les restaurateurs vont proposer uniquement les plats du jour : entre une et trois propositions par les entrées, les plats et les desserts. C’est plus simple pour le restaurateur, il ne fera que les commandes de ses plats du jour », estime Yonathan Malet, fondateur de Resto du coin.

Les clients de l’application peuvent s’abonner à leur restaurant préféré et recevoir une alerte du plat proposé chaque jour. Alors que les commissions des plateformes de livraison s’établissent autour de 30 %, Resto du coin ne facture que 1 € au restaurant pour chaque mise en relation. « Quand le restaurateur fait lui-même sa livraison, il touchera le prix de celle-ci. Nous avons levé toutes les barrières pour que ce soit accessible à tous les restaurateurs, et nous classons les restaurants par localisation la plus proche », note Yonathan Malet. Resto du coin a commencé son activité le 11 janvier à Paris, uniquement en vente à emporter, puis discutera avec des partenaires afin de proposer un service de livraison sur le dernier kilomètre.

FoodChéri, filiale du groupe Sodexo

Créée en 2015 par des anciens salariés de La Fourchette, FoodChéri est un spécialiste de la confection et de la livraison de repas frais en entreprise. La start-up française a été rachetée par le groupe marseillais Sodexo en 2018. Le géant de la restauration collective, qui avait alors investi entre 13 M€ et 16 M€, détient aujourd’hui 80 % du capital de l’enseigne. FoodChéri achète ses matières premières en Île-de-France et propose des plats, principalement composés de produits végétaux, dans les grandes villes françaises. Toujours dirigée par son fondateur Patrick Asdaghi, l’entreprise de foodtech a lancé Seazon depuis 2018, une formule sur abonnement à la semaine destinée aux particuliers.

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