En 2019, près de 87 % des salariés français déclaraient prendre un petit déjeuner le matin, dont 72 % à leur domicile1. Souvent qualifié de repas le plus important de la journée, le petit déjeuner est incontournable pour une majorité de consommateurs, qui n'hésitent plus à le prendre en dehors de leur foyer, sur place ou à emporter. En septembre 2018, la prise du petit déjeuner en hors domicile avait progressé de 8 % sur 12 mois2. Cette tendance est très perceptible dans les enseignes de restauration rapide qui ont investi massivement ce créneau, notamment McDonald's et ses McCafé. Le segment du petit déjeuner est aussi largement investi par des indépendants : des coffee-shops, mais aussi des restaurants qui enrichissent leur carte avec une offre petit déjeuner ou brunch. Ce repas originaire des États-Unis, qui mêle petit déjeuner et déjeuner, séduit de plus en plus de ce côté de l'Atlantique. Les chiffres du moteur de recherche de Google sont éloquents. Entre février 2004 et février 2022, le mot clé « brunch » a connu une progression impressionnante en France, passant de 12 à 100 points d'intérêt, quand le terme « déjeuner » passait seulement de 20 à 38 points3. Un terme plus particulièrement recherché dans les zones urbaines, à l'instar de la région parisienne.
Si le petit déjeuner comme le brunch gagnent en popularité en hors domicile, leur croissance fulgurante s'explique principalement par l'absence d'off re sur ces créneaux jusqu'à ces dernières années. « Si l'on parle de croissance fulgurante sur le segment du petit déjeuner aujourd'hui, c'est parce qu'on part du néant il y a cinq ou six ans », reconnaît Bernard Boutboul, président de Gira Conseil, cabinet spécialiste de la restauration. « Historiquement, les Français ne petit-déjeunent pas. Il y a quatre ou cinq ans nous avions lancé une enquête Gira sur le petit déjeuner : 85 % des personnes interrogées nous avaient répondu oui, mais quand on leur demandait de quoi était composé ce repas, c'était un café ou un thé pour 92 % d'entre elles. » Des boissons chaudes avalées avant le départ pour le travail, qui tendent aujourd'hui à être de plus en plus consommées avec une off re solide, les nutritionnistes ayant fait passer le message de l'importance d'une prise alimentaire le matin.
De nouvelles habitudes de consommation
Cette prise de conscience a influencé le hors-domicile, avec l'apparition d'offres dédiées à ce créneau. Dans le 3e arrondissement de Lyon, la brasserie Folliet propose deux formules classiques de petit déjeuner : pour 2,80 €, les clients peuvent s'offrir une viennoiserie accompagnée d'un café, ou opter pour une formule plus complète à 8 €. Cette dernière comprend une tartine, une viennoiserie, un jus, une boisson chaude ainsi que du beurre et de la confiture.
Dans cet établissement qui vit principalement de la clientèle de bureau travaillant à côté, le petit déjeuner reste relativement anecdotique : « En général, on sert une quinzaine de personnes dans la matinée avec ce type de formule », explique Charles Bertrand, responsable de la brasserie Folliet. Si la formule petit déjeuner de la brasserie représente une faible part de son activité, l'établissement a su viser juste en misant sur le créneau du brunch. Il y a deux ans, l'établissement a lancé une offre dominicale sous forme de buff et. « C'est notre plus grosse journée en matière de chiffre d'affaires : avec la Covid, nous avons souffert d'une baisse de fréquentation en semaine. On a décidé d'ouvrir le dimanche spécialement pour le brunch. » Pour 30 € par personne, les clients ont le choix entre une large de gamme de produits sucrés et salés : assortiments de charcuteries fines et fromages affinés, terrines, quiches, gaufres, tartes sucrées… le tout accompagné de boissons chaudes, de jus de fruits Alain Milliat et de vins de la maison Chapoutier. Le succès est au rendez-vous : les deux services dominicaux - à 11 h et 13 h 15 - font le plein « Le week-end dernier, on a fait 100 couverts. Le service de 11 h fonctionne un peu mieux que celui de 13 h 15, mais globalement nous affichons souvent complet sur les deux. Les gens réservent parfois jusqu'à un mois à l'avance », constate Charles Bertrand.
À noter cependant que dans cet établissement d'une capacité de 120 couverts (60 en intérieur et 60 en extérieur), la mise en place du buffet dans la salle fait perdre un peu de place pour asseoir les clients, sans pour autant limiter l'attractivité de ce créneau. « Comme on a tout de même pas mal de personnels présents le dimanche, il faut que nous servions une quarantaine de brunchs pour que ce soit rentable. »
Le brunch, un allié de taille
Il est un peu le nouveau repas dominical des Français : le brunch, à mi-chemin entre le petit déjeuner et le déjeuner, suscite l'enthousiasme en famille comme entre amis. « Pour moi, il représente la suite ou le complément logiques du petit déjeuner, si je ne petit-déjeune pas, il serait bon de pouvoir bruncher vers 10 h-11h, si jamais j'ai une réunion vers 12 h. Ce sont les nouveaux rythmes de travail qui favorisent ces deux créneaux », affirme Bernard Boutboul. Pour le président de Gira conseil, il y a une cohérence à proposer un brunch tout le long de la semaine. Certains en font d'ailleurs leur cœur de métier : dans les pentes de la Croix-Rousse à Lyon, le Desjeuneur propose une carte 100 % petit déjeuner de 10 h à 16 h en semaine et jusqu'à 17 h les week-ends. Outre une formule à 17,5 € comprenant boisson chaude, jus, yaourt fermier au granola (muesli cuit au four), et un plat au choix parmi quatre propositions, l'établissement propose plusieurs options à la carte. Le midi, de nouveaux plats deviennent disponibles à la carte, comme le croque truffé ainsi qu'une entrée et un plat du jour. L'établissement est très fréquenté, encore plus le week-end.
Plus populaire que le petit déjeuner, le brunch peut représenter un véritable atout pour vos établissements, notamment le week-end. Pour qui souhaite se positionner sur ce créneau, Bernard Boutboul recommande d'opter pour un buffet : « Les Français l'apprécient beaucoup pour le brunch : ils aiment pouvoir gérer leur temps, ce que ne permet pas un service à l'assiette. Le week-end, c'est un créneau de consommation particulièrement étalé, les gens peuvent rester plus de deux heures à table. »
C'est justement le choix du restaurant Accanto. Situé dans le 7e arrondissement de Lyon, cet établissement présente des plats d'inspiration italienne confectionnés avec des produits français et accordés avec des bières locales. Il a instauré son brunch en janvier 2022. « Les midis en semaine, on a une grosse clientèle de bureau, ceux du week-end étant un peu déserts, on a eu l'idée de lancer un brunch », explique Adrien Forestier, cofondateur de cet établissement ouvert en mai 2021. La formule est vendue 28 € et 15 € pour les enfants. Elle comprend une minipizza au choix, une boisson chaude, l'accès à un buffet salé et sucré 100 % maison ainsi qu'un jus de fruits ou une bière ou spritz. « Dans les établissements voisins, il y a beaucoup de brunchs à l'assiette : on a choisi de se démarquer avec le buffet à volonté et même si tout ce qui est servi n'est pas italien pour avoir de la diversité, on garde notre identité avec la mini-pizza et certains plats comme les gnocchis. » Ce brunch est accessible uniquement sur réservation les samedis et dimanches midi. Il a déjà permis de doubler la fréquentation le samedi midi, qui tournait autour de 15 couverts avant. « Sur le dimanche midi, ça a vraiment bien pris, on a multiplié la fréquentation par deux ou trois, les gens apprécient que tout soit maison et frais », constate Adrien Forestier.
Si vous souhaitez, vous aussi, vous lancer sur ce créneau, il est important de proposer un large choix à vos clients : du salé, du sucré, des softs mais également de l'alcool, des options convenant aux végétariens, voire aux enfants : chez Accanto, les petits bénéficient, par exemple, d'un bar à bonbons. « Pour le prix proposé, il n'y a pas forcément de cohérence : on en trouve entre 20 € et 30 €, et certains palaces en proposent à plus de 100 €. Comme pour le burger, il y en a pour toutes les bourses et toutes les qualités », conclut Bernard Boutboul.
1. Baromètre Lavazza-Ifop, juin 2019.
2. The NPD Group/CREST®, CAM 12 mois à fin septembre 2018.
3. Les résultats reflètent la proportion de recherches portant sur un mot clé donné dans une région et pour une période spécifique, par rapport à la région où le taux d'utilisation de ce mot clé est le plus élevé.