« En 2016, j’ai fondé ISTR (huîtres en breton) avec deux associés, Pierre-Michaël Smague et Pascal Gauthier, rue Notre-Dame-de-Nazareth (Paris 3e). L’idée était de créer un trait d’union entre le terroir régional aux influences bretonnes et le meilleur de la culture new-yorkaise, à travers ses modes de consommation. Sur 140 m2, nous avons installé un bar à cocktails avec un comptoir de 13 m de long, un bar à huîtres et un restaurant proposant une cuisine bistronomique réalisée par Cyril Krieg. Meilleur apprenti d’Alsace, il a travaillé avec Yannick Alléno. Avant de nous rejoindre, il était second chez Lasserre. Nous disposions de 20 % de clientèle asiatique qui, durant les premiers mois de 2020, a fortement diminué en raison de l’épidémie qui a commencé à sévir là-bas. Aussi, la décision de fermer les restaurants ne nous a pas forcément surpris.
La margarita proposée en poche sous-vide (9 €). © ISTR
Nous avons mis huit personnes au chômage partiel. Nous avons attendu deux à trois semaines avant de prendre une initiative. Lorsque les règles du jeu ont été bien établies et que nous avons compris que cette fermeture serait longue, nous avons commencé à réfléchir. Comme beaucoup, nous avons commencé à songer à mettre en place de la vente de plats à emporter ou à livrer. Mais ce n’est pas forcément rentable, car cela suppose de déconfiner notre chef, de prendre en charge son salaire. Ensuite, il fallait remettre en place les relations avec les fournisseurs et les livraisons ; ce qui était assez compliqué. Par ailleurs, beaucoup de nos collègues s’engouffrent sur ce créneau qui risque d’être vite saturé. Nous avons finalement choisi de proposer à la vente à emporter et à la livraison des cocktails, des huîtres et des tapas. Nous avons choisi ce qui nous paraissait le plus rentable et le plus simple à mettre en œuvre. Finalement, notre métier, c’est l’apéritif et les cocktails. J’ai eu une carrière dans la mixologie et j’ai pris en main cette activité avec mon associé, sans employé. Nous avons mis trois semaines à élaborer cette offre baptisée « Take ISTR easy ». D’abord, nous conditionnons ces cocktails dans une poche plastique sous-vide. Il a fallu tester ce procédé et le maîtriser. Ensuite, nous avons préparé une communication adaptée avec notre attaché de presse, Julien Verry. Nous communiquons aussi beaucoup sur les réseaux sociaux où une part importante de notre clientèle nous suivait déjà. Les cocktails sont imaginés autour d’un pairing avec les huîtres ou les mélanges terre-mer. Ils sont vendus avec des fruits frais et une poche de glace au prix de 9 € les 10 cl ou 36 € les 50 cl. Parallèlement, nous proposons des bouteilles de vins (16 à 22 €), des paniers apéros avec une bouteille de vin (27 à 29 €) des tapas (6 à 9 €), ou encore une douzaine de fines de claires n° 3 (24 €). Ce service est effectué de 16 h à 21 h du mercredi au samedi.
Quelques-uns des tapas proposés. © ISTR
Pour accompagner cette initiative, chaque jour, à 16 heures, ISTR publie sur Instagram des recettes que notre chef réalise à domicile pour sa propre famille. Les livraisons sont garanties en une demi-heure via Deliveroo ou la plate-forme de notre site, ce qui est préférable pour nous. Deliveroo prélève 30 % de la commande, alors que nos propres livraisons nous reviennent à 7 % du prix de la commande et ne présentent pas de limite géographique. Pour la VAE, nous avons mis en place un système de clic & collect très pratique pour le client. Nous proposons ce service depuis le 22 avril et nous manquons de recul pour en apprécier les retombées. Mais les premiers résultats sont encourageants. Le premier but de cette initiative n’est pas de gagner de l’argent, mais de comprendre comment notre métier évolue dans cette période particulière et de préparer l’avenir. Je ne vois pas comment nous pourrons nous passer de la vente à emporter lorsque les restaurants pourront ouvrir. »