Jean-Luc Jamrozik entame une seconde vie

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Ancien patron de la sommellerie des hôtels Baltimore et Lancaster, Jean-Luc Jamrozik entame une seconde vie. L’inamovible et consensuel président des sommeliers de Paris devient la figure d’un nouveau site de vente de vins créé par son fils. Une nouvelle aventure pour celui qui sait parler du vignoble comme nul autre.

Quentin et Jean-Luc Jamrosik
Quentin et Jean-Luc Jamrosik

Ancien grand maître des caves du Baltimore et du Lancaster, Jean-Luc Jamrozik s’affirme, depuis de nombreuses années, incontournable dans le monde de la sommellerie. Depuis 2007, il est élu haut la main à la présidence de l’association professionnelle parisienne qui rassemble 250 sommeliers. Dans les épreuves des concours, on remarque souvent sa présence discrète et bienveillante auprès des jeunes concurrents. Connu pour ses talents de formateur, il assure une inlassable promotion d’un métier qui le passionne. Après 46 années de carrière, il garde une curiosité intacte et une envie de relever les défis, dans son métier mais aussi dans les Triathlon où il s’aligne parfois aux côtés de l’un de ses fils.

« À l’âge de 26 ans on m ’a confié les clés de la cave. »

Toujours animateur d’une société de conseil, il a coiffé l’année dernière une nouvelle casquette. Il travaille pour D’or et de vins, un site de vente de vins en ligne créé par l’un de ses fils, Quentin Jamrozik, et un associé, Michel Lannou, un jeune Colombien de 28 ans. Jean-Luc Jamrozik n’a pas hésité longtemps avant de se lancer dans cette nouvelle aventure où il joue un rôle déterminant. C’est notamment lui qui sélectionne les 250 vins proposés en ligne. Des bouteilles de 13 à 180 €. Toutes les sélections sont réalisées collégialement à travers des dégustations à l’aveugle supervisées par le président des sommeliers de Paris. Son savoir-faire, son entregent, lui permettent de disposer des cuvées rares, voire des crus contingentés, comme les Clos Saint-Patrice, à Châteauneuf-du-Pape (Vaucluse). Car dans ce milieu qui fonctionne beaucoup sur la confiance, la réputation du président des sommeliers de Paris se révèle une clé d’entrée de choix. Pour se différencier dans ce secteur très concurrentiel des sites de vente de vins, les trois hommes proposent des livraisons sur la capitale garanties en trois heures. Actuellement gratuit, ce service sera payant à partir du mois de juin. Mais surtout, le site a décidé d’accentuer le conseil au client via Internet. Grâce à un système de chat, les internautes peuvent poser des questions et recevoir simultanément des réponses déclinées par Jean-Luc Jamrozik.

Une riche carrière 

À 63 ans, le sommelier a saisi cette nouvelle occasion de partager son savoir, de transmettre, mais aussi de continuer à faire des rencontres humainement enrichissantes. Ces rencontres constituent le fil conducteur d’une carrière modèle guidée par la curiosité et la passion. Après un CAP professionnel passé à Compiègne, il obtient son BEP à l’école Jean-Drouant, à Paris et part travailler dans un hôtel à Birmingham à la fin des années 1970. Il poursuit son périple en intégrant le Gavroche, à Londres, le restaurant des frères Roux, triplement étoilé par le Michelin. Cette ouverture sur le monde en Grande-Bretagne va imprégner toute la carrière de ce petit-fils d’aviateur polonais et d’une infirmière écossaise qui se sont rencontrés en Belgique durant la Première Guerre mondiale. En effet, après quelques saisons sur la Côte d’Azur, il intègre l’équipe de salle de l’Hôtel Baltimore, le plus british des établissements parisiens. « À l’âge de 26 ans, on m’a confié les clés de la cave, se souvient-il. Deux ans plus tard, j’étais promu chef sommelier. » Au Baltimore, son parcours croise à nouveau Albert Roux, le chef franco-britannique, invité en 1994 à créer le restaurant Bertie’s dans l’hôtel de l’avenue Kléber.

Jean-Luc Jamrozik est ainsi resté jusqu’en 2018 au Baltimore, date où il a pris sa retraite tout en demeurant aujourd’hui encore consultant de l’établissement. Il a même durant des années dirigé parallèlement la sommellerie de l’hôtel Lancaster qui évoluait dans le même groupe. Grâce à sa longue présence dans ces deux établissements, le patron des sommeliers parisiens est ainsi devenu un spécialiste de la clientèle anglo-saxonne, un public de connaisseurs auquel Jean-Luc Jamrozik propose une approche pragmatique du vin. Il n’est pas de ceux qui pérorent devant les tablées avec un ton condescendant. Il a l’art de se mettre à la hauteur de ses hôtes pour mieux leur faire partager ses découvertes. Il n’a aucun tabou et va jusqu’à louer la nouvelle génération des rosés souvent snobée par ses confrères. Ses qualités d’ouverture ont valu à ce triathlonien amateur la confiance de l’ensemble de la profession. Sa réputation de bon camarade n’est plus à faire. En 1984, en lice pour le concours de Meilleur jeune sommelier de France, il a échoué face à un concurrent prometteur, un certain Philippe Faure-Brac. « Au lieu de prendre mes affaires et de rentrer chez moi, raconte-t-il, je lui ai proposé mon aide pour l’entraînement et ces séances m’ont aussi permis de progresser. C’est ainsi que je vois les choses ! »

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