Julien Royer, de Riom à Singapour

  • Temps de lecture : 4 min

Le Cantalien Julien Royer sévit dans la cité-État de Singapour depuis 2011. D’abord chef du restaurant Jeanne de 2011 à 2014, il a lancé, avec son associé Wee Teng Wen, un établissement gastronomique baptisé Odette, en hommage à sa grand-mère. Trois macarons lui ont été décernés dans l’édition 2019 du Guide Michelin.

Numéro 1 de l’Asia’s 50 Best Restaurants (et 18e au niveau mondial), trois étoiles dans l’édition singapourienne du Guide rouge : 2019 aura été l’année de la consécration pour le chef Julien Royer. À 37 ans, ce natif de Riom-ès-Montagnes, dans le Cantal, figure parmi les Français les plus en vue en Asie aux côtés de chefs emblématiques comme Paul Pairet. Dans la cité-État de Singapour, où fourmillent près de 6 millions d’habitants, Julien Royer a pris ses quartiers au sein de la National Gallery. Épaulé par son associé Wee Teng Wen, il a créé dans ce musée singapourien un restaurant gastronomique d’une douzaine de tables. C’est pour rendre hommage à sa grand-mère, qui l’a initié aux plaisirs du palais, que Julien Royer a choisi de nommer l’établissement Odette. La seule évocation de ce prénom lui remémore la cueillette aux champignons, l’élevage des volailles et des lapins, la confection des confitures ou de la tarte aux fromages… Dans son Cantal natal, on préparait même de la charcuterie après avoir tué le cochon. Autant dire que le chef singapourien a pu se frotter à une grande variété de produits. Pendant son BTS Arts culinaires à Chamalières (Puy-de-Dôme), il réalise son stage de fin d’année au sein du restaurant de Michel Bras, à Laguiole, en 2003. Le jeune chef intègre ainsi sa première grande maison : « J’ai découvert le fonctionnement d’une brigade étoilée au Michelin. Les Bras avaient tout compris à la grande cuisine ; tout était réglé comme du papier à musique. Il régnait une grande sérénité et il y avait de la communication.  » Après un passage dans les cuisines du Bailliage, à Salers, son parcours, placé sous le signe des astres, se poursuit chez Bernard Andrieux, à Durtol, dans l’établissement aujourd’hui occupé par le doublement étoilé Xavier Beaudiment. Une période de trois ans qui permet à Julien Royer de « consolider ses connaissances en matière de cuisine traditionnelle » et le mène dans un hôtel de luxe du groupe Barrière, à Saint-Barthélemy.


« L’ADN de mon travail demeure la cuisine française »


Est-ce le soleil des Antilles qui a donné le goût du voyage au chef ? Hormis à Méribel, en 2007, le chef du restaurant Odette ne posera plus ses valises en France métropolitaine. Après les Antilles françaises, il devient chef du St. Regis à Bora Bora. « C’était un gros challenge, car il fallait s’occuper des petits déjeuners, des déjeuners, des dîners et des brunchs. Je ne prenais pas trop de plaisir, mais j’ai appris à compter et à gérer les coûts », détaille Julien Royer. On retrouve le Cantalien à Londres en 2010, aux côtés du chef Antonin Bonnet, mais c’est finalement dans l’ancienne colonie britannique de Singapour que Julien Royer décide de se sédentariser. Entre 2011 et 2014, il anime ainsi le restaurant Jeanne et ses 35 couverts campés dans le Swissôtel de la cité-État. « Je me suis tout simplement éclaté. Il n’y avait que dix tables et j’ai ainsi pu développer ma technique. J’avais carte blanche auprès de la direction et c’est durant cette période que j’ai fait ma première apparition dans le classement 50’s Best Restaurants Asia », se félicite-t-il. Dès 2015, approché par la National Gallery de Singapour, il ouvre Odette avec son associé Wee Teng Wen. Cette consécration, Julien Royer explique la devoir à l’importante évolution de sa cuisine. « Après dix ans en Asie, je me suis largement imprégné des techniques et des goûts, confesse-t-il. J’ajoute aujourd’hui dans mes plats des références à ma terre d’accueil et je n’hésite pas à utiliser de la citronnelle, de la noix de coco, etc. Mais il ne s’agit en aucun cas de cuisine fusion : l’ADN de mon travail demeure la cuisine française, donc on trouve par exemple beaucoup de sauces ! » Seule contrainte ? L’approvisionnement des produits. À Singapour, peu de choses sont produites locale-ment, mais la « situation de carrefour » de l’ancienne colonie britannique permet de pallier ce problème.


Parmi les assiettes qui ont fait la renommée du maître queux auvergnat, on peut citer le pigeon, cuit sur le coffre et en trois services, le foie gras « comme un pho » ou encore le king crab, escorté d’une rémoulade de gingembre, de poire nashi et de coriandre ; une cuisine franche, directe et savoureuse qui a notamment séduit les inspecteurs du Guide Michelin. En 2016, date de la première incursion du Bibendum à Singapour, Julien Royer est adoubé de deux macarons, puis d’un troisième l’an passé. Il réalise, chez Odette, un ticket moyen inférieur à celui d’un trois-étoiles européen (200 dollars singapouriens le midi, 400 le soir ; soit 130 euros et 260 euros), mais qui lui a permis d’ouvrir récemment un deuxième établissement, baptisé Louise, à Hong Kong. 

PARTAGER