La contre-proposition de la CNTR

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Le gouvernement a accordé une réévaluation du plafond des titres-restaurants, les faisant passer de 19 à 95 € mais celle-ci suscite l’exaspération des restaurateurs. Une contre-proposition par le président du CNTR a été émise à Bruno Le Maire le 27 avril.

[Mis à jour le 04/05/2020 à 18 heures]

L’annonce il y a deux semaines par le gouvernement de l’élévation à 95 € du plafond de titres-restaurant (19 € actuellement) a soulevé l’exaspération de nombreux restaurateurs et des syndicats professionnels. Ces derniers voient là s’évaporer des parts d’un marché auxquels ils n’avaient plus accès mais qu’ils espéraient largement récupérer lors de la réouverture de leurs établissements. L’incidence de ce moyen de paiement n’est pas neutre dans l’économie. Plus de 6 milliards d’euros sont ainsi injectés dans les restaurants et les commerces de bouche chaque année. En moyenne, ce titre de paiement représente 15 % du CA des restaurants lors du déjeuner. Pour certains établissements cette proportion peut monter jusqu’à 80 %.

Avec l’arrêt des restaurants, le volume des titres-restaurant s’accumule dans les poches des Français. Romain Vidal, représentant des restaurateurs à la CNTR (Commission Nationale des Titres-Restaurant) estime aujourd’hui ce volume à près d’un milliard d’euros. Le gouvernement a vu dans cette manne un moyen de soutenir la consommation des Français dans une période de crise. Mais il est évident que cette élévation du plafond à 95 € va d’abord bénéficier à la grande distribution en permettant à ses clients de payer en une seule fois une grosse partie de leurs achats alimentaires. Les restaurateurs craignent fort que lorsqu’ils rouvriront, cette épargne de titres-restaurant ait fondu comme beurre au soleil. 


Contre-proposition

Le 27 avril, Patrick Bouderbala, président de la CNTR et représentant du collège employeurs, a décidé de faire une contre-proposition, plus favorable aux restaurateurs dans une lettre adressée à Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances. Ce courrier est soutenu par les collèges employeurs, salariés et restaurateurs ; les émetteurs n’étant pas parvenus à dégager une unanimité sur la question. Ces modifications dérogatoires de l’encadrement des titres-restaurants s’étendraient jusqu’à la fin de l’année et se limiteraient à doubler le plafond quotidien de l’utilisation des titres-restaurant pour le porter à 38 €. En outre, la CNTR préconise de lever plusieurs limitations de circulation. Il s’agirait d’abord d’autoriser l’utilisation de ce moyen de paiement tous les jours de la semaine, y compris le dimanche et les jours fériés. Le courrier demande ensuite que le salarié puisse utiliser le titre-restaurant sur toute la France et non plus dans sa région d’émission. Cet élargissement du périmètre de validité permettra aux salariés d’utiliser ce moyen de paiement durant leurs vacances. D’ailleurs Patrick Bouderbala recommande enfin au ministre d’utiliser ce levier social pour agrandir le pouvoir d’achats des salariés en faisant passer de 60 à 90 % la limite supérieure défiscalisée de la contribution employeurs ; ce qui permettrait de porter la valeur maximale des titres-restaurant entre 10 et 11 €.

Le décret portant le plafond à 95 € n’a pas été publié la semaine passée. Le gouvernement semble à l’écoute des objections de la CNTR et des restaurateurs. Un courrier, conjointement signé par Muriel Pénicaud et Bruno Le Maire, a été adressé à la CNTR le 30 avril. Le gouvernement s’est montré à l’écoute de cette contreproposition et a formulé la possibilité de mise en place de dispositions plus favorables à la restauration. A l’heure où nous écrivons ces lignes, le débat semble largement ouvert. La concertation s’organise. D’ailleurs, le 4 mai, dans un article des Echos, Edenred, émetteur numéro un des titres (Ticket restaurant), a lui aussi formulé des propositions beaucoup plus favorables aux restaurateurs. 

Enfin la bonne volonté du gouvernement  a été confirmée par Didier Chenet, président du GNI, qui a indiqué que Bruno Le Maire menait une réflexion sur le sujet et que son syndicat soutenait deux propositions : relever de 15 à 38 voire 95€ le plafonds de paiement en Titres restaurant lors de la réouverture des restaurants et le versement des « perdus périmés » à un fonds de solidarité.

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