Le végétal veut jouer les premiers rôles

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Les Français aiment la bonne chère, mais sont de moins en moins réticents à commander des repas végétariens. La majorité d’entre eux déclare en consommer aujourd’hui. En restauration, plusieurs chefs œuvrent pour introduire davantage de végétal dans leurs menus. Des industriels sont également mobilisés dans cette démarche.

La gastronomie française intègre plus de légumes et de produits végétaux dans ses plats depuis quelques années. Notre tradition culinaire est encore bien imprégnée par la nourriture carnée, mais 60 % des Français déclarent consommer aujourd’hui des repas végétariens, révèle une enquête Opinion Way menée pour Beendhi en juillet 2020. « Près d’un quart (23 %) en consomme plusieurs fois par semaine et 18 % en consomment plusieurs fois par mois », précise l’étude. Néanmoins, 40 % des personnes interrogées affirment toujours ne jamais consommer ce type de repas. Et cette tradition persiste également sur les tables des restaurants (quand ils sont ouverts). « Je suis d’une école qui veut que lorsque l’on va au restaurant, il y ait un beau morceau de poisson ou une belle pièce de viande », reconnaît Victor Mercier, chef du restaurant gastronomique FIEF (Paris 11e), dont le menu dégustation en six temps accorde « une grande dominance de végétal » . Le restaurant du finaliste de Top Chef 2018 proposera d’ailleurs bientôt un menu vegan en trois temps.

Travailler le légume avec conviction

Chef pionnier de la restauration végétarienne en France, Jean Montagard constate aujourd’hui une évolution des mentalités à l’égard de cette cuisine. Ce membre des Disciples d’Escoffier avait ouvert avec L’artisan gourmand, en 1978 à Menton (Alpes-Maritimes), le premier restaurant végétarien cité par le Gault & Millau. « Il y a de plus en plus de restaurants végétariens aujourd’hui, mais la tendance vegan l’a un peu emporté sur la cuisine végétarienne, observe Jean Montagard. C’est une tendance que je regrette, j’œuvre pour la cuisine végétarienne, mais avec le véganisme nous sommes un peu dans l’excès. » Le chef n’exerce plus en restauration depuis 2001. Il est aujourd’hui conseiller pour la promotion des produits bio et donne des cours de cuisine végétarienne à son domicile. Selon lui, « la cuisine végétarienne peut être excellente si l’on travaille le légume avec professionnalisme et conviction ».

Mais Jean Montagard regrette le « peu de créativité » des plats proposés dans les menus végétariens de trop nombreux restaurants : « Pour beaucoup de cuisiniers, la viande et le poisson sont les seuls aliments nobles. Nous devrions davantage développer le bio et la cuisine végétale dans les écoles hôtelières. Il devrait y avoir davantage de formations sur ce type d’alimentation, même s’il n’y a que la prise de conscience individuelle qui permette de changer les choses. » Afin d’inclure davantage de produits végétaux en restauration, des entreprises spécialisées dans la préparation de légumes travaillent de concert avec les cuisiniers. « Notre mission est de rendre le végétal accessible. Nous avons une équipe de conseillers culinaires qui accompagnent les restaurateurs et les chefs pour passer au végétal. Nous avons réalisé des études ethnographiques, appliquées à la cuisine, pour déterminer les objectifs et le rôle du végétal, détaille Nicolas Dron, directeur marketing de Bonduelle food service. Nous avons développé un service greenologie qui révèle que les convives ont envie d’un végétal plus coloré et plus marquant. Mais les cuisiniers n’ont pas forcément appris cela en école hôtelière. » L’enseigne Bonduelle food service aurait formé plus de 500 chefs en physique sur cette thématique, et plusieurs milliers via ses cours en ligne.

Avec des produits comme le mélange d’épeautre et de lentilles corail ou l’orge perlé, Bonduelle fait sortir l’offre de légumes des sentiers battus.


« Le végétal est à la croisée des attentes actuelles : le bio, le local, la vitalité. Nous avons aujourd’hui une nouvelle offre autour des céréales. Elle est pratique et permet de simplifier le travail des chefs. Il est compliqué de maîtriser la cuisson des céréales. Cette offre simple et non transformée sert d’axes de travail en cuisine » , précise Nicolas Dron. La branche food service du groupe D’Aucy aide également les chefs en restauration commerciale « à travers des livrets d’idées recettes réalisées lors d’un atelier culinaire à l’école Ferrandi ». Ces fascicules sont distribués dans des salons dédiés à la restauration ou lors des visites des conseillers commerciaux de la marque. Prenant en compte l’importance des plats végétariens, D’Aucy food service développe aussi « des gammes de légumes secs et céréales pour répondre à la diversification des protéines, note la directrice marketing Nathalie Douis. Notre gamme de produits élaborés d’œufs Cocotine répond également au menu végétarien ».

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