Les moules de bouchot de la baie du Mont-Saint-Michel, un coquillage entre terre et mer

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Un cadre de rêve pour un produit d’exception. Les moules de bouchot AOP de la baie du Mont-Saint-Michel puisent leur singularité dans leur terroir atypique, entre terre et mer.

Elle est unique. Par son goût, par sa couleur, par sa forme, et par ses influences. La moule de bouchot AOP du Mont-Saint-Michel clame haut et fort sa singularité, grâce à l’implication du comité de défense de l’appellation. Résultat : une AOC obtenue en 2006, suivie de l’actuelle AOP décrochée en 2011. L’élevage sur bouchot s’est largement développé au cours du XXe siècle sur les côtes bretonnes et normandes, et la baie n’a jamais abandonné cette méthode.

Depuis 1954, la mytiliculture s’est invitée au pied du Mont-Saint-Michel et compte aujourd’hui pas moins de 43 entreprises, 80 concessions familiales pour 248 km de bouchots. Mais attention, les lignes de ces fameux pieux recouverts de moules ne peuvent pas excéder 100 m (110 à 140 pieux par ligne) pour une hauteur maximale de 3,50 m. En tout, 318 000 pieux abritent ce fameux coquillage, qui fait l’une des réputations gastronomiques de la baie avec l’agneau des prés salés. Un parc important pour maîtriser la production, qui oscille entre 10 000 et 12 000 tonnes par an.

« Si on dépasse, on risque de faire baisser la qualité du produit et favoriser le développement des maladies. Il faut absolument veiller à ne pas surcharger la baie », explique Nicolas Lebeau, mytiliculteur et président du comité AOP. 

© Pierrick Contin


moules de bouchot AOP Mont-Saint-Michel
La production oscille entre 10 000 et 12 000 tonnes par an. © Clotilde Audroing Philippe

 

SINGULARITÉ MAÎTRISÉE

La gestion du biotope de la zone est l’une des grandes priorités pour cette AOP marine. « Au fil des années, on a su observer le comportement de la baie. Des pieux ont été déplacés. Nous limitons l’élevage à 2 ans et les lignes ne sont que partiellement occupées en réalité. Au maximum, on est sur des taux d’occupation qui s’élèvent à 55 ou 65 % selon les zones. Car nous devons observer des temps de jachère : une année sur deux, les pieux sont libres. » Une manière de préserver l’environnement, le biotope et la qualité du produit. Le métier reste artisanal, même si des bateaux amphibies permettent aujourd’hui de faciliter l’entretien et la récolte. Car la méthode d’élevage sur bouchot permet justement de s’adapter à la caractéristique des marées. Les moules passent ainsi autant de temps immergées qu’émergées. Plus petite et plus tendre que la moule de Méditerranée, la moule de bouchot de la baie du Mont-Saint-Michel se distingue par son onctuosité, son côté charnu, sa couleur qui évolue entre l’orangé et le jaune vif. 

Photo Ⓒ Hector Barotoqui


Son exposition partielle à l’air lui permet aussi d’être plus résistante ; ce qui évite l’ouverture prématurée des coquilles une fois les moules récoltées. Ce site exceptionnel classé au patrimoine mondial de l’Unesco est extrêmement riche. « Avec les trois grosses rivières qui apportent beaucoup de nutriments, et les marées importantes où la mer peut reculer jusqu’à 5 km, la biodiversité est d’une richesse incroyable. Cet échange entre terre et mer est très important », précise Nicolas Lebeau.

Ainsi, l’effet terroir existe réellement et se distingue même en fonction de la zone dans le biotope. De la frontière avec la Normandie jusqu’à Cancale, la moule n’aura pas forcément la même saveur. « On retrouve un petit goût de noisette parfois, elles peuvent aussi être légèrement sucrées. Nos trois zones sont très spécifiques et très différentes. Même au sein de la baie, on arrive à distinguer à la dégustation de quelle zone provient la moule. » Cette singularité gustative charme les restaurateurs, qui la valorisent souvent de la manière la plus simple possible. « Le produit se suffit à lui-même. »




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