Les poids lourds de la restauration strasbourgeoise

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La bonne santé de l’hôtellerie-restauration strasbourgeoise a permis la naissance de groupes indépendants qui fédèrent de nombreux restaurants. Alors que certains préfèrent jouer la carte traditionnelle de la winstub et de la brasserie, d’autres inventent des concepts très innovants et attractifs.

La ville de Strasbourg compte 126 hôtels. Crédits : L'Auvergnat de Paris.
La ville de Strasbourg compte 126 hôtels. Crédits : L'Auvergnat de Paris.

La capitale alsacienne jouit d’une attractivité importante et l’activité de l’hôtellerie-restauration semble avoir bien résisté à la Covid. Beaucoup d’établissements de la cité alsacienne ont déjà retrouvé leurs chiffres de 2019. « C’est une des villes de France qui maintient le mieux son activité hôtelière, hors littoral, affirme Jacques Chomentowski, président local de l’Umih. La santé économique de la ville a permis le développement d’une hôtellerie haut de gamme. » Ainsi, Strasbourg compte 126 hôtels, soit 7 729 chambres. En 2019, année de référence, ils affichaient un taux d’occupation moyen très honorable de 68 %.

Ces bonnes conditions générales ont permis à une bonne demi-douzaine d’indépendants de constituer des pôles de restauration commerciale qui dépassent les 10 M€ de chiffre d’affaires annuel. Jean-Noël Dron, le leader de la restauration locale estime que le phénomène n’est pas nouveau : « Cela a toujours existé, il y a vingt ans, il y avait déjà des groupes indépendants importants dans cette ville, mais ils portaient d’autres noms : Baumann, Dieterlé, Schloesser. »

Strasbourg bénéficie en effet d’un alignement des planètes : une économie prospère, la présence de structures telles que le Parlement européen, l’ENA, et cerise sur le gâteau, un tourisme assez régulier sur l’année. Franck Meunier, acteur important sur le plan local ajoute un détail important : « Bien sûr, il y a une activité touristique importante, mais surtout, nous bénéficions d’une clientèle locale qui sort et va au restaurant, et pas uniquement en fin de semaine. Elle prend son temps pour déjeuner et ne regarde pas à la dépense. C’est ce qui fait la différence. »

La situation frontalière de la ville représente aussi un atout. Le vocable « touriste » concerne aussi les voisins du Rhin qui sont souvent des habitués. Schématiquement, les Strasbourgeois vont acheter leurs cigarettes en Allemagne et les Allemands franchissent volontiers le fleuve pour goûter aux plaisirs de la gastronomie alsacienne. Marc Faller, autre poids lourd de la ville, insiste sur les particularités locales : « Depuis huit ans, je note une effervescence. C’est peut-être le résultat de la baisse de la TVA qui nous a permis d’investir. La médiatisation de notre métier a aussi été une bonne chose. Il y avait aux commandes une génération ancienne et moins formée qui est partie à la retraite. Il est aussi possible qu’il y ait eu une forme d’émulation entre différents indépendants locaux. »

D’année en année, les résultats de cette mutation sont de plus en plus visibles comme le constate Jacques Chomentowski : « On trouve encore ici des fonds de brasseries à vendre à 700 ou 800 K€, mais il faut reconnaître que les primo-accédants ont du mal à acheter. Sans ces groupes, le développement serait plus mesuré. Auparavant, une grosse brasserie réalisait un CA de l’ordre de 1,5 M€, aujourd’hui on parle plutôt de 4,5 M€. »

En outre, cette ville présente une importante offre traditionnelle parmi les brasseries et les winstubs. Ce segment de marché résiste mieux qu’ailleurs, mais il est complété par une belle inventivité des capitaines de restauration locaux. Ils ont su mettre en scène des concepts inventifs. Entre le Tigre, le Drunky Stork Social Club, le Météor, Strasbourg arbore de belles surprises ; d’autres découvertes devraient éclore également l’année prochaine.

Damien Delalleau, Les restaurants alsaciens : la carte touristique

Damien Delalleau qui vient de fêter ses 57 ans, est connu pour sa discrétion et refuse de parler à la presse. C’est aujourd’hui lui qui contrôle le plus d’établissements dans la ville. Ce natif du Pas-de-Calais, installé depuis des lustres à Strasbourg s’est d’abord fait connaître comme le lieutenant de Guy-Pierre Baumann, puis a progressé seul. Il a largement parié sur l’arrivée du TGV et le développement touristique de la capitale pour collectionner les winstubs bien placées dans les rues du centre-ville (Le Gruber, Lohkäs, Meiselocker, Au Bon Vivant). Cela ne l’a pas empêché parallèlement de miser sur des concepts de tapas, de sushis ou de pizzas. Il s’est enfin appliqué à s’implanter dans des villages pittoresques alsaciens avec des concepts de winstub aussi. À la fin de l’année dernière, il a fait l’acquisition de la Choucrouterie, le restaurant du théâtre éponyme.

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19 restaurants dont 14 à Strasbourg – CA HT 2019 : 13 M€
www.restaurants-alsaciens.fr

Jean-Noêl Dron, Trasco : la force tranquille

Strasbourg est devenu un terrain de jeu trop petit pour Jean-Noël Dron. Après ses débuts de restaurateur en 1995 dans la capitale alsacienne, il s’est implanté au fil des années à Metz, Reims, puis à Nancy en acquérant des brasseries auprès du groupe Flo. En 2018, il met un pied à Paris en rachetant au groupe Bertrand deux autres fleurons des brasseries Flo, Julien pour le convertir en bouillon et surtout le symbolique Floderer, là où Jean-Paul Bucher avait démarré en 1968 pour bâtir ensuite Flo, un des premiers groupes français.

Dans les années 1990, Jean-Noël Dron se préparait à devenir notaire. Il a finalement abandonné ses études de droit pour acheter un restaurant strasbourgeois, le Rive gauche. Il a ensuite enchaîné les succès jusqu’à frapper un grand coup en 2009 en persuadant Guy-Pierre Baumann de lui céder la Maison Kammerzell, une institution locale, voisine de la cathédrale. Aujourd’hui, âgé de 49 ans, il n’est pas celui qui contrôle le plus d’adresses dans la ville, mais en matière de chiffre d’affaires, il distance largement ses concurrents.

iJean-Noël Dron (au centre).
Jean-Noël Dron (au centre).

Toutefois, il privilégie les grands restaurants. Ses deux plus belles adresses, l’Excelsior à Nancy et la Maison Kammerzell à Strasbourg, sont au coude à coude, réalisant chacune un CA annuel de l’ordre de 7 M€. Pour autant, ce patron reste avant tout strasbourgeois. Il a montré l’année dernière qu’il fallait toujours compter avec lui dans la ville, en rachetant à Elior l’Ancienne Douane, une winstub de 600 places assises, dotée d’une immense terrasse surplombant l’Ill. Plus récemment, il a mis la main sur la Chaîne d’or qui devrait fermer au 1er septembre afin de rouvrir avant les fêtes, rénovée, affichant un nouveau nom et un nouveau concept.

Rencontré au Café Brant, à Strasbourg, acquis en 2014, il apparaît un plateau à la main. « Quand je viens dans une brasserie, je prête systématiquement main-forte à l’équipe, assure-t-il, Ce n’est pas simplement pour montrer l’exemple. Je ne parviens pas à rester inactif. » Il affirme aussi un amour inconditionnel pour les brasseries traditionnelles : « C’est dans ces lieux historiques où je me sens à l’aise, avec des tickets moyens qui vont de 25 à 60 €. Je ne me vois pas développer une affaire où la limonade domine. » Il croit en l’avenir de la brasserie et mise largement sur ce concept. Il n’exclut pourtant pas de s’aventurer dans les années qui viennent sur un terrain différent, mais privilégierait dans ce cas une association avec un spécialiste.

Il faut tout de même rappeler qu’à Paris, il a fait partie des restaurateurs à l’origine de la vague des bouillons avec la transformation de la brasserie Julien. Mais pour lui, cette mutation était le seul moyen de stopper la perte de vitesse de l’établissement en revenant à l’origine de cette adresse créée en tant que bouillon. « Quand j’achète un établissement, explique-t-il, j’essaie de donner un sens à l’histoire. Ainsi, le ticket moyen du Bouillon Julien est passé de 50 à 22 €, mais dans le même temps, la moyenne de fréquentation s’est stabilisée à 500 couverts/jour. »

L'Ancienne Douane et sa terrasse suspendue.
L'Ancienne Douane et sa terrasse suspendue.
La Maison Kammerzell, une institution locale.
La Maison Kammerzell, une institution locale.

450 employés – 15 restaurants (dont 11 sur Strasbourg) – CA HT 2021 : 35 M€

Jérôme Fricker, Diabolo Poivre gestion : le fort en thème

Dans une ville où la restauration cultive une image traditionnelle, Jérôme Fricker présente un profil plutôt iconoclaste. Il s’attache à revisiter les codes de concepts, allant de la winstub locale à la cuisine méditerranéenne, en passant par le gastropub. Son management est aussi atypique. Il est ainsi associé dans la plupart des restaurants qu’il contrôle avec Gilles Egloff ou Joseph Thomas. Une société, Diabolo poivre gestion, prend en main les problèmes de comptabilité et les questions sociales liées aux différentes adresses. Le trio s’est réparti les rôles. Jérôme Fricker gère les créations et acquisitions ainsi que les problèmes juridiques et financiers. Joseph Thomas se charge de l’exploitation alors que Gilles Egloff garde un œil sur les décors, le suivi commercial et la partie communication.

iJérôme Fricker.
Jérôme Fricker.

Curieusement, Jérôme Fricker est un des rares hommes à posséder un diplôme de gouvernante d’hôtel. « À l’époque, confie-t-il, mon dossier scolaire était jugé insuffisant pour intégrer un BTS en école hôtelière. C’est la seule classe où j’ai pu être admis car il y avait de la place. »

Il a travaillé dans plusieurs établissements strasbourgeois dont le Tapas café, où il a persuadé le patron de l’aider à ouvrir une épicerie. Grâce au succès de l’entreprise, il est en mesure de racheter cette enseigne. C’est le moment où sa vie d’entrepreneur a basculé. « Un soir, la balustrade d’un balcon a cédé, raconte-t-il. Je me suis retrouvé près d’un an entre hôpital et convalescence. Il a travaillé dans plusieurs établissements strasbourgeois dont le Tapas café, où il a persuadé le patron de l’aider à ouvrir une épicerie. Grâce au succès de l’entreprise, il est en mesure de racheter cette enseigne. C’est le moment où sa vie d’entrepreneur a basculé. « Un soir, la balustrade d’un balcon a cédé, raconte-t-il. Je me suis retrouvé près d’un an entre hôpital et convalescence. J’ai failli tout perdre donc j’ai revendu le Tapas café pour me replier sur l’épicerie. J’ai alors compris que je devais cesser cette vie où je travaillais 20 h par jour. Donc j’ai décidé de faire confiance à mes collaborateurs, j’ai augmenté les salaires et les effectifs. Depuis, tout fonctionne mieux. » Depuis, tout fonctionne mieux. »

Il estime aujourd’hui que sa force est de savoir déléguer et de pouvoir ainsi prendre du recul. L’ouverture de la Corde à linge a constitué un tremplin appréciable pour son groupe. Sur un emplacement de premier choix de la petite France, proche des écluses de l’Ill, il est parvenu à réunir deux établissements pour créer un restaurant flanqué d’une vaste terrasse de 280 places, prise d’assaut dès les beaux jours. « C’était l’endroit du lavoir, d’où le nom », explique ce patron alsacien. Il y propose les spaetzles, pâtes alsaciennes, mais aussi des spécialités de winstub légèrement revisitées. Toutes les recettes portent des noms de tissus ou de vêtements.

Par la suite, il s’est aventuré sur les thèmes bistronomique (La Hache), italien (Square) et méditerranéen (East Canteen). Il a même reproduit cette formule strasbourgeoise à Lyon. Sa dernière création, ouverte l’année passée, Drunky Stork Social Club, mise sur le concept du Gastropub. Pour cette réalisation, il n’a pas hésité à investir 2,8 M€ afin d’aménager un restaurant sur deux niveaux dans les anciens locaux de la Strassburger Bank. Mais son prochain défi se révèle encore plus audacieux. Il ouvrira au premier trimestre 2023 un restaurant de 210 places assises dans l’ancienne Poste, qui subit actuellement une vaste rénovation. L’investissement serait supérieur à 4 M€ et le restaurant devrait accueillir une formule bistronomique inspirée de celle qui est déjà en vigueur à La Hache.

iLa terrasse très fréquentée de la Corde à linge.
La terrasse très fréquentée de la Corde à linge.

250 employés – 8 restaurants (dont 7 à Strasbourg) – CA HT objectif 2022 : 18 M€
www.diabolo-poivre.com

Christophe Gros : le revenant

Christophe Gros n’est installé dans la capitale alsacienne que depuis 2015, date de l’acquisition du café Bâle, et depuis lors il a créé une trattoria, la Fuga, dans son village natal de Truchtersheim, non loin de Strasbourg. Il s’est surtout fait remarquer en rachetant au légendaire Bernard Rotman Aux douze apôtres. Ce pub mondialement connu, implanté au pied de la cathédrale, diff usait bien avant que cela ne devienne tendance des bières issues du monde entier. Christophe Gros a vite développé le potentiel de cet établissement, augmentant les becs pression, désormais au nombre de 25, distribuant 17 bières différentes. Il a étendu la carte des vins, déployé une offre de cocktails. Il a enfin mis en place une restauration en instaurant une cuisine et une seconde salle en sous-sol. Résultat, il est parvenu à multiplier le chiffre d’affaires de l’établissement par quatre.

Cet homme, aujourd’hui âgé de 51 ans, présent six jours sur sept dans ses établissements, a quitté Strasbourg assez jeune pour suivre des études dans une école de commerce parisienne. « Nous avons commencé à organiser des voyages pour les étudiants de l’école, puis nous avons fini par créer une entreprise de tour-opérateur centrée sur cette activité. » En développant son activité, il a racheté un tour-opérateur néerlandais qui détenait huit restaurants en montagne qu’il a regroupés sous l’entité la Grotte du yeti. Il s’est ainsi initié à la restauration avant d’entamer une nouvelle aventure professionnelle, en choisissant il y a une dizaine d’années de revenir à Strasbourg.

iChristophe Gros.
Christophe Gros.

75 employés – 3 restaurants (dont 2 à Strasbourg) – CA HT objectif 2022 : 6 M€

Franck Meunier, FBH : la créativité gagnante

En 1998, Franck Meunier créait son premier établissement strasbourgeois, une modeste pizzéria. Aujourd’hui, âgé de 50 ans, il affiche 25 créations au compteur. Il a conservé 13 adresses, les plus importantes, mais pas seulement. « Nous avons le Purgatoire, un bar à vins de 50 places qui connaît un succès considérable, déclare-t-il. Il y a des établissements qui, une fois lancés, demandent toujours de l’investissement personnel. D’autres fonctionnent facilement en autonomie. Je préfère conserver ces derniers pour me consacrer à la création. »

De ce côté, il a frappé fort en convainquant Meteor de conclure un partenariat pour ouvrir une gigantesque brasserie en plein centre-ville dans les locaux laissés vacants par un magasin Intersport. La réalisation du projet a absorbé 4 M€. Il y dispose de 800 places assises et peut accueillir jusqu’à 1 200 personnes. Michel Haag, le brasseur, lui fournit ainsi 14 brassins qui sont déclinés dans 28 becs pression. Certaines bières sont stockées dans des citernes de 1 000 litres et de 500 litres directement reliées aux pompes à bières.

Franck Meunier, qui a fréquenté le lycée d’Issoire (Puy-de-Dôme), a effectué une partie de ses études sur la mécanique des fluides à Clermont-Ferrand. Durant les soirées étudiantes, il fréquentait le Phidias et est devenu ami avec le patron du lieu, Serge Boudu. Il assure que ce dernier « lui a donné la vocation pour ce métier ». Arrivé à Strasbourg pour terminer un DESS de gestion, il a finalement bifurqué vers la restauration. Pour l’instant, il a limité son champ d’action à cette ville, à l’exception du rachat d’un petit hôtel-restaurant dans les Vosges. Mais il ne cache pas qu’il observe désormais de près le marché parisien. En attendant, Franck Meunier continue ses créations avec une régularité de métronome.

Pendant la crise sanitaire, il a ouvert la Cuvette du Bouillon. Il ne s’agit pas d’un vrai bouillon, mais d’un établissement ludique, comme le laisse présager la contrepèterie formulée par l’enseigne. Plus significatif, il vient de racheter un grand pub, le Kelly’s Sibin pour y instaurer un vaste concept qui verra le jour en 2023 et dont il ne veut pas dévoiler la nature. Deux autres projets menés par Franck Meunier pourraient encore voir le jour cette année-là.

Franck Meunier.
Franck Meunier.
Le Meteor, l'une des dernières créations de Franck Meunier.
Le Meteor, l'une des dernières créations de Franck Meunier.

350 employés – 13 restaurants – CA HT objectif 2022 : 20 M€

Marc Faller : une vision pragmatique

Marc Faller a attendu 40 ans pour se lancer dans la restauration. Ingénieur chez Bouygues, il estimait manquer d’indépendance. Aussi, il n’a pas beaucoup hésité quand son père lui a proposé de prendre la location-gérance de son restaurant Au pont Saint-Martin. Ce vaste établissement, logé sur les bords de l’Ill dans une vieille maison alsacienne couverte de géranium, figure souvent en bonne place sur les cartes postales de la Petite France. « Pendant trois ans, je me suis appliqué à optimiser le fonctionnement de ce restaurant, explique Marc Faller, ensuite, j’ai entamé le développement du groupe. »

Il totalise aujourd’hui 16 restaurants dont certaines institutions locales. Ces enseignes se répartissent en quatre catégories : les winstubs (Au pont Saint-Martin, Au Gutenberg, L’Ami Schutz) ; les Italiens (Il forno, le Marco Polo) ; des brasseries utilitaires (le Faubourg de pierre, la Rotonde, l’Europ café) et enfin un des deux restaurants de fruits de mer de la ville (la Taverne de Saint-Malo).

Pragmatique, Marc Faller se méfie des nouveaux concepts et préfère miser sur des valeurs sûres : « Lorsque j’achète un restaurant, je ne le révolutionne pas, mais j’essaie d’améliorer son potentiel. » Ce restaurateur fonctionne sans associés et sans gérance libre. Il contrôle personnellement l’intégralité de ses restaurants. Il estime que la crise sanitaire n’est pas encore dépassée : « Une certaine catégorie de touristes n’est pas revenue. Nous fonctionnons à 90 % du niveau pré-Covid. Comme le point mort de nos affaires est à 70 % de cette référence, notre capacité de développement est restreinte. » Pourtant, il poursuit son développement au gré des opportunités avec récemment l’acquisition des Deux Gourmandes, une winstub de la place Saint-Thomas.

Marc Faller au Marco Polo.
Marc Faller au Marco Polo.
Au pont Saint-Martin, le navire amiral de Marc Faller.
Au pont Saint-Martin, le navire amiral de Marc Faller.

125 employés en moyenne – 15 restaurants – CA HT objectif 2022 : 15 M€

Cédric Moulot, CM Collection : La famille Burrus maître à bord

Cédric Moulot apparaît sans doute comme le plus connu des restaurateurs strasbourgeois pour sa précocité et ses coups d’éclat. Ce Lorrain, formé au lycée hôtelier d’Illkirch, a acheté son premier restaurant strasbourgeois, le Tire-Bouchon, en 2003. Il était alors âgé de 25 ans. Le petit prince de la restauration alsacienne a vite grandi en se développant dans tous les secteurs, le traditionnel, la restauration rapide avec la franchise 231 East Street, mais aussi les tables gastronomiques avec le rachat du 1741 et surtout du Crocodile, restaurant qui fut triplement étoilé par le passé, à l’époque d’Émile Jung.

Au début de l’année cependant, le restaurateur a officialisé la prise de contrôle de son groupe par la famille Burrus, via le holding Salpa. Cette entité dispose d’un pôle tourisme au sein duquel on trouve notamment la distillerie Massenez. C’est désormais Jean-Philippe Burrus qui a la haute main sur les restaurants de Cédric Moulot.

Cette montée en puissance dans le capital du restaurateur aurait été initiée avant la crise sanitaire. C’est d’ailleurs la famille Burrus qui a racheté en 2021 Chez Yvonne, une institution strasbourgeoise à la famille Valmigère. Un indice qui laisse à penser que la stratégie du groupe s’oriente résolument vers le haut de gamme, puisque Cédric Moulot a cédé en septembre 2019 deux de ses restaurants touristiques, Meiselocker et Au Bon Vivant à Damien Delalleau. Il s’est également séparé en 2020 du Maïence, ouvert l’année précédente, mais qui n’avait semble-t-il pas trouvé son public. Reste à savoir si Cédric Moulot, aujourd’hui directeur général du groupe qui lui appartenait, s’attardera dans une structure où il est désormais minoritaire.

iCédric Moulot.
Cédric Moulot.

9 restaurants (hors restauration rapide) – CA HT 2019 : 10 M€

Le Tigre : la marque de Kronenbourg rugit encore

Difficile de parler de Strasbourg sans évoquer Kronenbourg. Depuis 2018, le brasseur dispose d’une adresse dont l’enseigne arbore l’une de ses marques, le Tigre. Il s’agit d’une résurrection puisque la famille Hatt, ancien propriétaire de Kronenbourg, avait créé en 1921 la bière Tigre Bock ainsi qu’une brasserie à ce nom sur cet emplacement. En 1964, l’établissement a fermé ses portes. Mais près d’un siècle après sa création, le Tigre rugit à nouveau grâce à un entrepreneur, Geoffroy Lebold, et quatre associés. Il a recréé cette brasserie sur 1 600 m². Elle se compose de deux parties distinctes : le Grand Tigre, le restaurant (200 places) et le Petit Tigre, le bar (120 places) mais aussi de deux terrasses privées (160 places), sans oublier un caveau de 80 places.

iGeoffroy Lebold, le patron du Tigre.
Geoffroy Lebold, le patron du Tigre.

Kronenbourg est partenaire du projet et ses maîtres brasseurs conseillent la gestion de la microbrasserie installée dans l’établissement. Elle produit cinq bières différentes à la marque Tigre Bock, dont deux saisonnières. Aucune de ces recettes ne correspond à la marque Tigre Bock actuellement commercialisée par Kronenbourg. Il s’agit de brassins spécifiques, de 3,5 ° à 6,4° développés exclusivement pour l’établissement.

Tigre décline une large restauration. Les tartes flambées occupent une bonne place sur la carte. La présence parmi les actionnaires d’un fondateur de la chaîne Flam’s, Éric Senet, justifie en partie ce phénomène. Elles sont vendues au prix de 8,20 €, un niveau assez élevé sur le marché local qui s’explique par la volonté de proposer un produit haut de gamme élaboré avec des ingrédients achetés à proximité de Strasbourg, comme de la farine de moulin. Geoffroy Lebold reconnaît que ces débuts n’ont pas été faciles car l’adresse a été confrontée successivement « aux Gilets jaunes, aux attentats locaux et à la crise sanitaire ». Néanmoins en 2019, l’établissement est parvenu à réaliser un CA de 2,5 M€ et devrait dépasser ce niveau en 2022.

www.letigre.eu

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