Mikaël Petrossian, le futur du caviar

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Représentant de la troisième génération à la tête de l’institution centenaire du caviar du boulevard de La Tour-Maubourg, à Paris, Mikaël Petrossian a pris la succession de son père il y a deux ans. Il a réussi à traverser la crise sanitaire en limitant les dégâts et souhaite désormais rajeunir sa clientèle, notamment en transformant le restaurant phare de la marque.

La saga de la Maison Petrossian vient d’enchaîner une troisième saison pour entamer son second siècle. Au mois de juillet 2019, Armen Petrossian, 72 ans, a transmis les rênes de la célèbre marque et les clés du siège du boulevard de la Tour-Maubourg (Paris 7e) à son fils, Mickaël, 41 ans. Le cadet, Alexandre, 38 ans, dirige de son côté la filiale américaine qui compte notamment trois restaurants boutiques, à New York, Los Angeles et Las Vegas. C’est donc un capitaine issu de la troisième génération qui vient de traverser la tempête de la Covid-19. Avec un CA assuré à 60 % par la distribution vers les restaurants, hôtels et compagnies aériennes, l’entreprise était très exposée à la crise actuelle. Mais Mikaël Petrossian a su s’extraire de ce piège pour n’abandonner au final que 10 % de son CA lors de cette période. « Ensuite, nos boutiques ont pris le relais avec une hausse des ventes de 20 % malgré la fermeture forcée de celles implantées dans des grands magasins », souligne le jeune président. Mais surtout, le nouveau dirigeant a trouvé de nouvelles sources de revenus en boos-tant le site marchand de la marque. Ce site qui ne réalisait que 800 K€ de ventes/an avant la crise a vu son CA annuel grimper à 3,4 M€.

Troisième génération à la tête de l’institution 

Une dizaine d’années auparavant, Mikaël Petrossian n’imaginait pas son avenir à la tête de la société familiale. Après de brillantes études en finances et en gestion, il a rejoint durant plusieurs années le groupe KPMG. Il y a une dizaine d’années, avec son épouse, Anaïs, il a créé Yoom, une enseigne spécialisée dans les dim sum. Il a détenu 5 restaurants avant de réduire la voilure à 2 unités. Mais l’expertise acquise dans ce produit lui permet aujourd’hui de distribuer des dim sum dans de nombreux restaurants et hôtels. Paradoxalement, cette incursion dans la restauration l’a conduit dans le giron familial puisqu’en 2013, son père lui a demandé de se pencher sur le restaurant du magasin historique, boulevard de La Tour-Maubourg. Rapidement, le jeune homme est devenu numéro deux de l’entreprise avant d’en prendre les rênes il y a 18 mois. Ses responsabilités sont très larges. Petrossian emploie 240 personnes dans le monde. Le seul atelier de production d’Angers mobilise 50 employés. Pourtant, le nouveau président garde un œil attentif sur le restaurant Petrossian. Le confinement l’a persuadé de faire évoluer le concept en profondeur avec l’aide du chef Renaud Ramamourty.

« Nos boutiques ont enregistré une hausse des ventes de 20 % »

Lors de la réouverture des restaurants, l’établissement va changer de nom pour devenir Mantchouk. Il s’émancipe des produits Petrossian et du caviar pour proposer une cuisine arméno-russe avec des spécialités comme des mantis (raviolis au bœuf). Durant les périodes de fermetures forcées, ce concept a été testé avec succès en vente à emporter et en livraison. En salle, le service sera simplifié en évacuant par exemple le nappage. Les prix sont revus à la baisse avec un ticket moyen qui devrait tourner autour de 50 € contre des niveaux de 80 € (déjeuner) et 150 € (dîner) pour l’ancienne formule. « Je souhaite proposer un lieu plus accessible et qui soit un véritable restaurant, pas un lieu de dégustation de nos produits, explique Mikaël Petrossian. Il me paraît aujourd’hui impératif de rajeunir notre clientèle. Ce restaurant représente aussi pour ma famille un rapprochement de nos origines. »

Une institution fondée en 1920

Cette institution parisienne, devenue leader mondial du caviar, a été fondée en 1920 par Melkoum et Mouchegh Petrossian. Après avoir fui la Russie, les deux frères ont lancé ce commerce des produits venus des pays de l’est. Le caviar n’était alors qu’un article parmi les autres. Très salé en raison des problèmes de conservation et de transport de l’époque, il réunissait peu d’inconditionnels. Par la suite, la demande de ce mets d’exception a explosé et la politique intransigeante en matière de qualité a permis à la maison de durer et d’imposer sa marque à l’international. Armen Petrossian, plus jeune fils d’un des fondateurs, Mouchegh, a pris la direction de l’entreprise il y a trente ans. C’est notamment lui qui a négocié le tournant qui a conduit en 2008 à proscrire dans le monde la vente de caviar sauvage. Bien avant, il avait amorcé la transition en mettant au catalogue des caviars d’élevage. Il a notamment été conseiller de la Cites (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages) contribuant ainsi à aboutir à cette interdiction qui devrait permettre à terme de reconstituer les élevages. Quinze ans plus tard, la maison Petrossian vend davantage de caviar. L’élevage qui s’est développé dans de nombreux pays a permis de reconstituer l’offre. Il ne faut cependant pas rêver, le caviar restera un produit de luxe, notamment en raison de son prix de revient. Il faut élever un esturgeon de nombreuses années avant de pouvoir prélever ses œufs. Pour un beluga, il faut attendre jusqu’à 15 ans.

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