Un peu d’imagination !

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Face à la déferlante du burger, il y a autre chose à explorer en matière de viande rouge dans la restauration. C’est le moment de surprendre vos clients lassés par les morceaux faciles à préparer à la maison dont ils ont abusé pendant les confinements. Mieux sélectionner la viande, la préparer autrement, autant de pistes pour donner un nouvel élan à son offre.

La crise sanitaire va-t-elle impacter la façon de consommer la viande au restaurant ? « Avant la crise, la consommation de viande de bœuf était en décroissance à domicile et progressait en restauration hors domicile, avec la consommation de pièces à griller et surtout une forte progression de la consommation de burgers, analyse Émilie Rautureau, responsable marque surgelés Charal.

Avec la crise sanitaire les Français ont consommé fortement de la viande à domicile et ce même entre les vagues de confinement. Mais il est encore trop tôt, avec la récente réouverture des restaurants pour dresser un bilan global de la consommation de viande en France tous circuits confondus. » Pourtant, les filières des viandes françaises comptent bien surfer cette vague. Leur consommation de produits tricolores a augmenté pendant la crise passant de 78 % à 83 % des achats. « 1,5 million de tonnes, c’est inégalé ! se félicite Emmanuel Bernard, président de la section bovine de l’interprofession Interbev. C’est encourageant pour la filière française, on aimerait maintenant que le consommateur puisse conserver ces bonnes habitudes prises lorsqu’il se rend au restaurant. »

L’hystérie autour du burger : un bien pour un mal 

Le client pourra, bien sûr, compter sur le burger, dopé un peu plus pendant la crise par le développement de la restauration rapide. Avec une croissance à deux chiffres depuis plusieurs années, l’appétit des Français pour ce plat ne semble pas près de s’apaiser. La plupart des innovations produits s’adressent d’ailleurs à ce type de préparations. « Le burger reste le 1 plat en restauration commerciale via lequel les convives consomment de la viande de bœuf, souligne Émilie Rautureau chez Charal. C’est la raison pour laquelle nous avons étoffé notre offre en proposant un nouveau produit pour réaliser des burgers, le moelleux spécial burger goût grillé. » 

Dans la même veine, Socopa restauration vient de mettre au point un smash burger « qui permet une meilleure maîtrise économique en permettant de rester généreux dans les portions ». Pour autant, cette hystérie à deux étages pourrait agir au détriment des autres pièces bouchères. « Notre souveraineté alimentaire passera notamment par la mobilisation des chefs. Lorsqu’ils pensent leurs cartes, ils doivent arriver à y mettre des muscles différents, estime Emmanuel Bernard d’Interbev.

Un des produits développé par Charal. 

Il est clair et net qu’on a besoin d’une diversité dans la façon de s’alimenter. Et par paresse, on a pris l’habitude de se tourner systématiquement vers certaines pièces jusqu’à standardiser la consommation. Ce défaut de curiosité vient aussi du consommateur. En lui expliquant l’intérêt gustatif de mettre de la joue de bœuf ou de la surprise dans un bourguignon, on valorise aussi le savoir-faire du cuisinier. Lorsqu’on cuisine un faux-filet, il n’y a pas beaucoup de travail, la qualité dépend avant tout du fournisseur. Mais en utilisant des morceaux moins habituels, on montre que c’est la patte du chef qui fait tout. »

Sortir des sentiers battus 

Il semble difficile de priver les clients de leurs sempiternels entrecôtes, faux-filets et onglets. Pour autant, les suggestions peuvent inciter les chefs à se replonger dans leurs connaissances bouchères pour en extirper la poire, l’araignée, la queue ou encore la joue de bœuf. « C’est intéressant aussi d’un point de vue économique. Selon la période de l’année, cela peut permettre à un restaurateur de créer de nouveaux plats à partir de morceaux en promotion », ajoute Emmanuel Bernard. Chez Socopa, « on essaye d’aller davantage vers le créneau des salades mais les produits restent assez peu connus. On voudrait montrer aux restaurateurs qu’on peut manger le bœuf autrement qu’en pièces ou en burger. » La marque vient de lancer deux références de bœuf froid, en gravelax et pastrami, qu’elle présentera au Sirha au mois de septembre.

Le pastrami signé Socopa. 

L’enjeu du « manger français »

« En viande, on ne révolutionne pas forcément les choses. On pousse la viande française, mais on constate qu’en restauration, ce n’est pas encore un réflexe majoritaire, note Déborah Béguin, responsable marketing restauration hors domicile et boucherie-charcuterie-traiteur chez Socopa restauration. Il y a encore une problématique d’approvisionnement parfois et un prix un peu élevé qui, il ne faut pas le nier, reste un critère déterminant. Mais on voit arriver l’effet domino des exigences clients. » Ce qui a notamment conduit le fournisseur à développer l’Origine France sur l’ensemble de ses hachés frais.

Il n’empêche que du côté des restaurateurs, un mouvement pour une consommation de viande plus réfléchie s’affiche de plus en plus. L’Association française des Maîtres restaurateurs vient de s’engager à travers une convention au côté d’Interbev et du bœuf Label Rouge pour défendre une restauration soucieuse de ses approvisionnements enviande et pour faciliter l’accès aux produits Label Rouge. De nombreux établissements ont également bien compris le potentiel différenciant de servir de la viande française. Les races, les labels, le bio sonnent comme un retour au terroir, avec ce côté rassurant pour le consommateur. « Il y a un vrai attrait pour les offres de viandes labellisées, que ce soit en restauration commerciale ou bien en restauration collective et ce pour des raisons différentes, affirme la responsable marque surgelés chez Charal, Émilie Rautureau. Dans cette ère du moins mais mieux, l’offre viande de bœuf Label Rouge fait son apparition sur les cartes des restaurants-brasseries. Reconnue pour sa qualité organoleptique supérieure, c’est un label reconnu par les Français. C’est la raison pour laquelle nous proposons un steak haché façon bouchère, en 12 % de MG, ce qui lui confère un juste équilibre entre jutosité et bon goût de viande. Nous avons également étoffé notre gamme de steak haché bio. » Avec l’effervescence de la reprise, difficile de mesurer le chemin parcouru sur le sujet. Mais le débat est bel et bien lancé, gage à la profession de s’en saisir.

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