ÉMILIE RICARD : LE COMPAS
Émilie Ricard n'a pas manqué le premier service au Compas. Cette longue période de sept mois d'inactivité lui a pesé ainsi qu'à son mari. Ce couple hyperactif qui détient quatre établissements parisiens a mal vécu cette période d'anxiété. Émilie reconnaît qu'elle n'a pas vraiment mis à profit cette parenthèse pour prendre du recul. Malgré tout, le démarrage en fanfare du Compas et du Café du Centre, rue Montorgueil (Paris 2e ), le 19 mai, tend à la rassurer. Ses clients ont témoigné de leur fidélité en venant en nombre. Pas une seule table de libre déjeuner comme au dîner, et elle doit même refuser les réservations pour le week-end qui suit. « Pourtant, indique-t-elle, c'est une vraie gageure de travailler avec cette pluie intermittente. »
ARTHUR : LE VALMY
Dès le matin, Arthur animait l'ouverture du Valmy, établissement coloré, installé le long du canal Saint-Martin (Paris 10e). Il avait installé sa terrasse le long de l'établissement, face au quai de Valmy. Son soulagement était manifeste. « Nous sommes tous très heureux de cette réouverture, assure-t-il. Nous avons déjà pas mal de clients en terrasse ce matin. C'est aussi un peu le rush entre la poursuite de la vente à emporter et la gestion du service de l'espace extérieur. Mais c'est un grand bonheur. » Un bonheur partagé par ses clients, à l'instar d'Anatole qui abonde : « Tant qu'il fait beau, je suis heureux. Mais le temps reste très incertain aujourd'hui. J'ai surtout hâte de pouvoir prendre un verre avec des amis à l'abri ! »
FLORIAN ÉBOUÉ : LE FLORIDA
À la fin août 2020, le Florida (Paris 1er) ouvrait ses portes après de nombreux mois de travaux ayant permis de réunir sous son enseigne les emplacements précédemment occupés par le Jet Lag et la Pointe Saint-Eustache. Avec 110 places assises et une terrasse de 150 places, le Florida promettait d'être une formidable machine de guerre du quartier des Halles dopé par trois ouvertures imminentes : le Grand Hôtel de la Poste, la Collection Pinault et le Cheval Blanc Hôtel. Mais peu après avoir trouvé ses marques, le Florida a dû fermer ses portes à la fin octobre au grand désespoir de Florian Éboué, le gérant. Ce dernier aborde cette réouverture avec enthousiasme, dopé par la fréquentation. « Depuis ce matin, j'ai le sourire vissé sur le visage, affirme-t-il. C'est très encourageant même si notre travail est rendu difficile par la pluie et le vent. Depuis la semaine dernière, nous enregistrons des réservations. »
MARGOT DUMANT : AUX CRUS DE BOURGOGNE
La pluie qui vient épisodiquement tremper les nappes immaculées n'entame en rien le sourire de Margot Dumant qui, en compagnie de son frère Félix, veille sur l'ouverture des Crus de Bourgogne (Paris 2e ). L'inactivité ne leur a guère pesé puisqu'ils ont orchestré des travaux dans les établissements de ce petit groupe familial et aménagé plusieurs terrasses annexes comme c'est le cas Aux Crus de Bourgogne et à l'Auberge bressane. Ils ont soigné les détails pour réussir cette ouverture allant jusqu'à choisir des parasols unifiables qui protègent mieux les tables de la pluie. Résultat, les 50 places des Crus de Bourgogne sont remplies. « Ce matin, j'avais le sourire jusque-là, confie-t-elle. C'est incroyable à quel point c'est une bonne nouvelle d'avoir à nouveau le droit de travailler. Ce qui m'a le plus émue, c'est qu'un de nos premiers clients fut un de ceux qui avaient assisté à notre dernier service fin octobre. »
DIDIER DESERT : L'AMBASSADE D'AUVERGNE
Malgré d'amples parasols, la terrasse l'Ambassade d'Auvergne a été balayée par les averses jeudi. « La conjonction du vent et de la pluie, c'est imparable », constate Didier Desert. Pour lui, cette ouverture réduite à la terrasse et assortie d'un couvre-feu n'est pas rentable. Il a néanmoins décidé de se lancer dans le jeu pour répondre à la formidable motivation de ses équipes. Malgré tout, les 32 couverts réalisés lors du déjeuner et les 55 réservations capitalisées pour le dîner ont mis un peu de baume au cœur de ce restaurateur qui a accumulé une dette équivalant à 30 % de son chiffre d'affaires durant la crise sanitaire. « C'est bien simple, fin 2019, je n'avais plus de dettes, résume-t-il. Aujourd'hui, j'ai le même niveau d'endettement qu'à mes débuts, il y a six ans. » Cet ancien consultant international bac + 7 ne regrette pas pour autant son aventure dans la restauration.
CYRIL MICHAUX : AU P'TIT PANAME
La joie se lit sur le visage de Cyril Michaux, patron du P'tit Paname (Paris 2e). « Je suis très heureux, soulagé de retrouver le métier que j'aime. Le simple fait d'apporter des bières aux clients fait du bien. La clientèle a vite répondu. » Pourtant, le deuxième confinement a cueilli à froid le jeune entrepreneur. En mai 2020, il a acheté sa première affaire, le Tavern café, belle brasserie des Grands Boulevards afin de la transformer. À la f i n août, après les travaux, il a ouvert à peine plus de deux mois avant de devoir refermer. « On commençait juste à se constituer une clientèle » , se désole-t-il. Il n'a pu encore accéder au fonds de solidarité. « Au départ, j'ai ressenti un gros coup de blues et j'ai opéré une remise en question, raconte-t-il. Mais rapidement on se relève et on repart. » La présence massive de la clientèle en ce premier jour d'ouverture le rassure, mais il est impatient de voir revenir les touristes, éléments indispensables au fonctionnement du P'tit Paname.
LAURENT NÈGRE : LA GRILLE MONTORGUEIL
Laurent Nègre a tenu à être présent lors de l'ouverture de la Grille Montorgueil (Paris 2e), même si sa terrasse ne lui permettait pas d'accueillir beaucoup de convives. Ses deux autres établissements, L'Étincelle (en gérance) et les Marmots, étaient également ouverts et disposaient chacun de 35 places grâce à une extension de terrasse sur la chaussée. Rue Montorgueil, il note « une belle activité, mais pas de folie ». La pluie intermittente lui a fait perdre une vingtaine de couverts et il prévoit le même manque à gagner le soir. Toutefois, le sourire est revenu sur le visage de cet Aveyronnais sur lequel le sort s'est acharné. Avant de traverser la crise sanitaire, un de ses établissements, les Marmots, a été fermé durant un an, à la suite de l'explosion de la rue de Trévise. Philosophe, il déclare : « Nous allons attendre le mois de juin pour vraiment travailler, mais c'est quand même agréable de retrouver quelques automatismes. »
JEAN-PAUL NOËL : PARIS HALLES
Jean-Paul Noël est revenu à Paris une semaine avant le 19 mai pour préparer l'ouverture du Paris Halles (Paris 1er), un de ses deux établissements. Auparavant, il travaillait sur sa ferme dans le Cantal, occupation qui lui a permis d'éviter d'angoisser. Les aides qu'il a reçues étaient insuffisantes pour couvrir le loyer que son propriétaire a exigé sans répit depuis le début de la crise. Il attendait avec impatience le signal du redémarrage. Sa terrasse qui ne désemplit pas contribue à le rassurer : « J'ai eu une table de 12 personnes au déjeuner et ils reviennent ce soir à 15. » Seule ombre au tableau, la pluie perturbe le travail, mais globalement, le restaurateur est optimiste : « Aux Halles, nous avons été perturbés par des années de travaux qui se sont terminés en 2019. À partir de là, nous avons commencé à travailler correctement jusqu'au premier confinement. Si l'épidémie est réellement jugulée, il n'y a aucune raison pour que l'activité ne redémarre pas. »